82.
WORDS [NEIL
YOUNG]
Il
fallut moins de vingt-quatre
heures
pour que tout le lycée
soit au courant de mon
improbable
romance avec Olympia. Pour les garçons qui
l'avaient côtoyée comme pour ceux qui ne la connaissaient que de
réputation,
je devins
une
sorte de légende vivante
! Les filles ne furent pas moins folles : elles
se lancèrent dans une vaine chasse avec l'espoir irraisonné
de supplanter
la belle
!
La
situation
nous
faisait
souvent
rire,
même
si
nous avions
beaucoup
mieux
à faire. Olympia
me
racontait
sa vie
dans
les
moindres
détails
et
je lui sautais
dessus.
Je lui
contais
la mienne
sans
rien
omettre
et
elle
me
sautait
dessus.
Elle me
faisait
découvrir
le
tango
et
je
lui sautais
dessus.
Je lui
jouais
des disques
de
blues
d'avant-guerre
et
elle me
sautait
dessus.
Elle
m'aidait à travailler
mon tambourin
et
je
lui sautais dessus. Je lui
montrais comment
secouer
convenablement
mes
maracas
(ici, la
phrase peut porter à
confusion
mais,
vu
la
teneur
de ce paragraphe,
ce n'est pas si
grave
!) et
elle
me sautait
dessus.
Le
groupe observait
une pause au
milieu
d'une
répétition
et je lui sautais
dessus
dans
la suite parentale, sous
les
gros
yeux d'un authentique
portrait
peint
par
Margaret
Keane.
Bref,
nous
nous
sautions
dessus
et
nous
nous
sautions
encore dessus.
C'était
une
chouette
période
!
Avec
Mizanu,
ce
ne
fut pas mal
non
plus
(enfin, presque (c'est incroyable le poids que peu faire ce petit mot
pas bien beau)). Mes chers amis attendirent
six
mois
avant
d'oser
se
mettre
en
quête de
leur
chanteur
sans
paroles.
Pendant
ce
temps,
je pus
faire
comme si mon grand rêve avait encore toutes ses chances. Guillaume
était
ce genre
de
rare batteur
qui
sait
s'éclater
sans
en
faire des tonnes
de caisses et
il
me
laissait
un
maximum de
place pour
m'amuser
avec
mes
modestes
instruments.
Et
puis,
il
y eut
la première répétition de ce fameux
moment
ou
on
me laisserait
de
nouveau m'approcher
du
micro.
J'écrivis un
nouveau texte pour
la
si
particulière
occasion.
Il s'intitulait
Boulevard
des
bouleversements
et
Olympia
était dingue du premier
vers
:
« Je
cherche
des
bouleversements
intimes
au milieu
des
tangos
absurdes.
» Pour
ce
titre,
Chris
et
Cyril
lâchaient
leur
guitare
pour emprunter
mes
jouets
et offrir un plus bel espace à
Polina
et
Alphonse.
Chaque
fois que je finissais
de
hurler
le
final
(au
porte de l'évanouissement)
: « Je cherche
une
sortie
d'au
secours,
un
jardin secret
pour
l'aimer
jusqu'au
lendemain de
l'éternité
», j'espérais
avoir
été
suffisamment
convainquant
pour
qu'ils
me
disent
que
j'étais
assez bon
pour
tenir
seul
le
micro,
mais
la
phrase ne
résonna jamais
que
dans
mon
crâne en bouillie. Je crois que l'idée même ne leur traversa
jamais l'esprit. Ils me répétaient qu'ils adoraient, mais quand on
adore n'est-on pas sensé en vouloir davantage ? Malgré quelques
aimables insinuations d'Isidore, mon plus grand fan, rien ne vint.
A
la fin des répétitions, il me restait tout juste assez de force
pour sauter une nouvelle fois sur ma muse et m’abîmer au fond de
ses yeux couleur d'abysses.
Et
les six mois passèrent... J'avais essayé de m'y préparer, mais
quand Polina me montra la petite annonce, les mots me brûlèrent
comme si elle m'avait jeté un verre de vitriol au visage. Ce n'était
plus qu'une question de temps, bientôt un étranger à notre bande
allait chanter mes mots, peut-être me demander de modifier mes
textes, et cela m'horrifiait... Cela n'avait rien de commun avec la
jalousie ou l'égoïsme, un inconnu allait manger mes rêves sur ma
tête, tel un singe grignotant les poux à même le crâne de son
voisin, et je devais faire semblant d'accepter avec un sourire niais.
La nuit, je tournais et virais dans ma cage de coton pendant que les
cauchemars succédaient aux cauchemars. Sous un dernier déluge
électrique, je voyais Olympia et Polina, nues au milieu de la salle
de répétitions, et jouissant comme des damnées, alors que le
crooner enrobait mes mots dans son miel empoisonné...
21 commentaires:
Et que je te saute dessus et que je te ressaute dessus… non mais, c'est pas un peu fini toutes ces cochonneries !!!!! C'est que je commence à avoir le rouge au joue !
Les paroles font très rock progressif des années 70. Christian Décamps aurait pu pondre de telles phrases.
Encore un bel épisode… y aura-t-il un meurtre dans le prochain ?!?
hello,
j'aime bien la fin, enfin le reste aussi, mais le paragraphe final j'aime vraiment bien, j'trouve que tu cernes bien cette frustration d'être le mec qui écrit dans l'ombre alors qu'il voudrait être dans la lumière.
parler d'un parolier, pourquoi pas. mais le rêve de tout ado timide, d'être ce jim morisson là, dos au public, transi de lui-même et qui quand le courage de ne plus être totalement lui le prend, qu'il se retourne, parvient à chavirer non seulement la salle, mais également les musiciens et le monde entier... ce rêve là est plus souvent une désillusion, une brisure, un échec qu'il est difficile de cerner.
et ça rend bien quand tu en causes.
sinon je ne suis pas certain mais "l'avaient côtoyé" y'a pas un "e" ?
@ yggdralivre
Je confirme : il y a bien un "e"… c'est un "e" de Pâques !!!!!
Oui, sautons. Des lignes, à saute-moutons, des étapes, des humeurs, bref tout ce qu'on veut. Et vive les maracas.
Bravo pour cet épisode. Je commence ma journée en imaginant ces deux damnées sous le déluge. The show must go on !
L'auteur emporté par son texte. C'est rare mais ça arrive. Ensuite quand le calme revint, effectivement, la position du parolier - même en fiction - intéresse. Les rares témoignages restent dans la création, mais rarement les états d'âmes n'ont été racontés.
Hello Keith,
Tu ne pouvais guère me faire moins plaisir qu'en me comparant à Christian Décamps, mais comme je sais que tu es fan de Ange, je vais prendre ça pour un compliment.
Au sujet du meurtre, il faudrait te souvenir d'un vieil épisode en forme de flashback... Tu touches là un point primordial pour la suite...
Hi Yggdralivre,
Mon personnage se tient juste à la frontière de l'ombre et de la lumière: une place pour le moins délicate.
N'hésite pas à corriger mes fautes, je suis allé le moins longtemps possible à l'école et il m'arrive de commettre de grosses boulettes.
Hola Nestor,
Le show continu et ça va chauffer encore bien davantage.
Hello Devant,
Comme je te le disais la semaine dernière, je veux aller au-delà de l'histoire classique d'un groupe lambda, j'espère y parvenir en vous captivant un peu!
J'ai hésité à rebondir sur le commentaire faisant référence à Décamps. Je pensais bien que ce qui se dit sur ses textes pouvaient mal passer. Mais est ce que ces critiques ne sont pas un peu injustes, du coup je pense que Keith n'a pas trop tort.
Je ne suis pas un spécialiste de la belle poésie, je me souviens par exemple du titre "Jour Après Jour" tellement délicat, juste le texte. Donc? Donc c'est un chouette compliment.
"Je cherche une sortie d'au secours, un jardin secret pour l'aimer jusqu'au lendemain de l'éternité"
Yo !
Sex and sex and ... sex ! Ca me va.
Drugs on peut faire sans quant au rock'n'roll ça finira par arriver et le vilain petit canard deviendra crooner.
Va t'en savoir.
Devant,
Pour moi, "Jour après jour", c'est davantage Philippe Pascal (Marc Seberg):
"Jour après jour de verre en verre,
et puis de bars de nuit en d'autres verres.
Les rêves s'évanouissent sans bruit
au bout d'un comptoir ivre d'ennui,
ivre de vin, ne plus se mordre les mains."
Hi Everett,
Certainement pas crooner, comme le disait Nick Cave, c'est une insulte!
Si Nick Cave le dit c'est forcément vrai.
Ola Jimmy,
Si j'avais une quelconque influence sur la bande de zigotos je leur aurais expliqué comment s'adapter aux "capacités" techniques du chanteur peut donner toute sa saveur et sa personnalité à un groupe. L'important c'est de trouver sa voix.
Mais voyons comment tout ça va évoluer et déjà qui sera cet(te) usurpateur(trice) derrière le micro.
C'est marrant que tu centres le rêve de ton personnage sur le fait de chanter. Devenir parolier parait effectivement être très décallé avec la mythologie du rock, et la desillusion plus grande.
Mais tu n'évoques pas la partie musicale. Qu'est-ce qui l'empêcherait d'écrire des chansons s'il a compris la leçon du punk et la démystification d'écrire un morceau de musique? Et d'apprendre rudimentairement un instrument style guitare ou basse?
J'ai du mal à concevoir quelqu'un aussi baigné de musique que lui ne pas vouloir se frotter aux mélodies et à la musqiue.
Pour revenir sur le texte en lui-même, le style est beaucoup plus fort que le précédent. Et on sent une petite tension montée d'un cran, comme si peu à peu il se trouvait face au mur, avec pur seul échappatoire à ses rêves la belle Olympia, qui est du coup bien trop belle pour être réelle ou éternelle.
@Jimy, mon sentiment: Tu es moins noir et davantage lyrique je trouve.
Les premiers vers de Décamps
"Assis au bord de la fontaine,
au lointain j'aperçu Pharaon,
le chien courait a perdre haleine,
les cailloux fuyaient sous ses bonds.
"
@Keith : bien vu le coup de l'e de pâques.^^
@Jimmy Jim : je ne suis pas fortiche non plus, mais si j'en vois en passant, pas de souci.
@devant : c'est malin! maintenant j'écoute "ange", ça faisait un moment, c'est marrant parce que j'ai toujours trouvé la production de leur album un peu terne... à la réécoute je trouve que le son n'a pas le souffle suffisamment pour tenir la charge épique des compos (texte z'et musique). je ne suis pas fan de tout mais y'a du très bon
Hello Till,
Chantant archi faux et ayant pourtant tenu le micro pendant des années, je vois exactement à quoi tu fais allusion, sauf que ça ne servirait pas du tout mon histoire!
Hi Audrey,
Je comprends très bien ce que tu expliques, sauf que lorsque tu écris des textes, tu as envie de les chanter, pas de devenir guitariste et, comme écrit dans le commentaire précédent, mon histoire a besoin de sacrifier mon héros! (De plus, j'utilise mon ressenti personnel et la voix m'a toujours beaucoup plus attirée que n'importe quel instrument. Toujours à cause des textes, je suppose, j'ai toujours été un homme de mots...)
Je suis d'accord avec toi mais, comme je te l'ai déjà dit sur d'autres chapitres, le fond influence forcément la forme: certains chapitres réclament davantage de légèreté. Je pense que vous le remarquez davantage à cause de la lecture hebdomadaire et que cela passerait mieux sur une lecture plus suivie (j'espère, en tous cas!).
Hola Devant,
Même dans mes textes les plus noirs, j'ai toujours voulu garder une petite place pour la lumière. Je sais que mon "lyrisme" peut me jouer des tours! Ce qui me dérange chez Ange, c'est plus la voix que je trouve hyper maniérée que les textes eux-mêmes. Et je ne parle pas de la musique... Quand j'étais gosse, j'ai aimé Genesis, Yes et Ange (je l'avoue difficilement!), j'ai réessayé depuis et j'ai trouvé ça totalement indigeste.
@yggdralivre
Ha Malin, malin sans demi. Mois aussi je me suis refais "AU delà Du Délire" et "Émile Jacotey" Parce que cela m'arrive encore occasionnellement et que le qualificatif de "Indigeste" a réveillé en moi une curiosité. Tu as raison sur ce point, la prise de son étouffée sur basse et batterie fait une drôle d'impression, surtout quand le chant, lui, se détache bien. Pour une fois, je regrette pour Ange qu'il n'ait pas eu un bon ingénieur du son. Bon "Au delà.." c'est mon cousin qui me l'a fait découvrir en 74, avec "Quadrophenia" des Who et "Tales.." de Yes. Forcément je garde une tendresse et continue à frissonner sur le final de "Au delà.." Pauvre Décamps, étouffé par la modestie.
Ah la sublime époque où la "Chose" était si neuve, si fraîche, si électrisante...
Moi aussi j"'ai aimé Ange, c'est un des tout premiers groupe que j'ai écouté... "Au delà du délire"...
On commet tous des erreurs, ce qui est grave, c'est ceux qui n'en sont jamais sortis!
Je le ré-écouterais bien quand même celui pour voir... par contre, Yes et Genesis que j'appréciais beaucoup (surtout Yes) au milieu des années 70, j'ai essayé à nouveau et euh... enfin c'est plus pour moi, de même que le Floyd d'après Syd Barré ou Klaus Schulze (lui, çà aurait pu encore passer s'il ne s'avait pas fait autant mu-muse avec ses synthés)... where have all the good times gone ?
Je t'assure qu'Ange c'est encore pire, à cause de cette voix hyper démonstrative: inaudible!
Euh Jimmy... je préférais quand y'avait des (ou plutôt une) fille sublime en photo d'illustration !
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