Sur mon précédent post concernant Merzbow, notre ami Keith Michards avait laissé le commentaire suivant : "J'ai failli mourir. Vous pouvez appeler ça amas bruitiste, déferlement sonore ou bouillie acoustique, mais pas musique, non, surtout pas musique !", soit exactement ce que sa maman lui répète depuis qu'il a découvert le heavy metal ! Je ne peux, ici, cacher ma satisfaction d'avoir terrassé un dragon soit-disant spécialiste dans l'éclate tympans ! Ils sont finalement bien fragiles, ces metalleux, quand ça envoie vraiment du bois ! Pour ceux qui ne s'y seraient pas encore risqués, ce nouvel album me semble la meilleure porte d'entrée. En effet, Merzbow instille quelques gouttes de violette dans son habituelle mixture au vitriol (toute proportion gardée, on parle tout de même d'un des musiciens les plus extrêmes de tous les temps). Ici, pendant qu'il semble détruire son matériel d'une main, l'autre donne l'impression de recréer un monde. A longueur d'année, les vieux grigous ne cessent de répéter que tout a déjà été fait (en mieux), voilà enfin un artiste qui ne doit vraiment pas grand chose au passé. Cet univers est tellement violent qu'on ne peut que fuir ou se laisser totalement submerger. Pour les rares spécimen qui tiendront le choc, il peut alors se produire une sensation pour le moins étranges : enveloppés dans ce tsunami, ils pourront sentir un souffle étonnamment réconfortant, comme seuls les survivants d'une immense catastrophe peuvent en connaître. Oui, Merzbow propose l'apocalypse et la résurrection dans le même élan généreux ! Uniquement réservé aux véritables curieux...
Jimmy JIMI (Merci d'avance pour vos commentaires !)
Jimmy JIMI (Merci d'avance pour vos commentaires !)
01 - Hanamuguri
02 - Yumimonkuchiba
03 - Uzumushi
04 - Douganebuibui
MP3 (320 kbps) + front cover
25 commentaires:
Complètement frappadingues ces Nippons...et c'est comme çà qu'on les aime !
Je partage ton appréciation Jimmy sur ces chochottes de hard rockeus... faites leur écouter le "Quatuor avec hélicoptère" de Stockausaen et contemplez la débandade...
Heureusement, l'ami Keith a d'autres cordes à son arc.
... et on aime bien le chahuter de temps à autres !
Je file dans mon abri anti-atomique !!!!!
Yo !
Je trouve rassurant que des trucs comme ça existent et que des mecs comme vous l'écoutent...
Ca me fait pas peur (chuis pas un métalleux moi) mais j'ai du mal sur la durée. Enfin, durée ... courte la durée !
Bah ça m'étonne pas que les surfeurs craignent ce genre de tsunami sonore :D..
Merzbow, c'est infernal.. et "Vitriol" c'est pas loin. Il faut voir ses virées chez Constellation, Substratif, ses collaborations, ses décollages, une référence dans le noisy.. l'acidité poussée à l'extrême..mais y'a qq opus qui passent des fois.
Je ne connais pas cette nouveauté, merci Djim.
Excellent en effet, merci beaucoup... Bon dans la chronique il vaudrait mieux parler de réincarnation plutôt que de résurrection concernant Merzbow... Rien n'empêche de parler de la nature de bouddha d'Arvo Part, bien sûr, mais quand même ça fait un peu bizarre.
Quand tu penses que le titre Konchuuki qui signifie insect machine fait référence à Souvenirs entomologiques de Jean-Henri Fabre, tu te dis qu'il connait beaucoup mieux la culture française que nous nous connaissons la culture japonaise et bien moi je trouve ça un peu flippant.
Très malin comme présentation parce que tu as piqué ma curiosité. Pas pour ce soir, mais promis je jette une oreille à cette promesse de vacarme tsunamique.
Hello Keith,
N'oublie pas tes disques de Maiden!
Hi Everett,
Comme indiqué, celui-ci est un tout petit peu plus facilement praticable pour les oreilles frileuses, tu devrais essayer...
Hola Charlu,
Je suis encore loin d'avoir fait la moitié du tour, mais je continue mes recherches.
Hello Sb,
Heureux d'avoir de tes nouvelles depuis tout ce temps... Personnellement, et sans me vanter, je pense connaitre la poésie japonaise sur le bout de ses trois (voire cinq) vers, mais j'ai encore du chemin pour la musique.
Hi Audrey,
J'espère que tu reviendras nous dire...
c'est du brutal !!
(je prends des cours de zen dans les réponses :) )
Bon j'ai testé. Et ça l'a évoqué tous ces disques de musiques indus avec des morceaux de 10mn de magma sonore où au bout du compte, il n'y avait pas grand chose. Je ne dirais pas ça de ce groupe que j'ai survolé, mais je sais que je n'aurai jamais envie de le réecouter. Pour les sensations fortes, j'ai déjà une petite collection de disque indus que je n'écoute plus trop souvent.
Hello Yggdralivre,
J'avais prévenu!
Hi Audrey,
C'est un artiste qui demande beaucoup d'effort et peux poser pas mal de questions, et je comprends parfaitement qu'on ne puisse pas aimer. Ce qui m'énerve ce sont les réactions "à la Picasso", genre: "un gamin de huit ans peut le faire etc."
Hey Jimi,
Il y a un commentaire qui va en ce sens sur Amazon.com
L'un dit pour se moquer de Merzbow :"I find it fascinating that today anyone can become an artist, and that anything can be considered art!"
et j'avais beaucoup aimé la réponse qu'avait faite un autre
"I'm glad you didn't enjoy it; that's why there are different kinds of music in the world. But it's pretty much missing the boat to claim that someone with over 200 albums to his name, who has been pioneering in the field for 30 or more years warrants the phrase "today anyone can become an artist". Merzbow has been working at it for a long time."
La réponse ne contredit pas l'idée qu'un enfant puisse en faire autant mais rapproche l'art de la vie et semble dire que si quelqu'un fait aussi bien que Merzbow celui-ci a bien de la chance.
C'est là aussi une des leçons du Zen : l'esprit dans lequel on fait quelque chose importe plus que le résultat lui-même. Cela marche également pour l'écoute d'un disque... L'esprit dans lequel on écoute un disque importe plus que le disque lui-même.
Merci, Sb, pour ce magnifique commentaire. Le "problème", c'est qu'on écoute pas un disque de ce genre, comme ça en passant, il réclame une attention nouvelle que peu sont capables de d'offrir.
Je ne sais si l'esprit compte davantage que l'objet, mais celui-ci me met dans un bel état!
En peut écouter en passant seulement si on en a l'habitude. Un peu comme ceux qui fréquentent régulièrement les expos d'art contemporain, arrivent à faire le tri plus ou moins. A l'inverse ceux qui n'en n'ont pas l'habitude auront plus facilement une attitude de rejet "en bloc" de tout l'art contemporain.
En passant, j'écoute en ce moment les trois derniers disques de chez Baskaru. Avec l'habitude ça passe vraiment bien. C'est plus facile que Merzbow, peut-être.
https://baskaru.bandcamp.com/album/ethers
Merci pour le conseil, je vais essayer.
C'est exactement ça, c'est une musique qu'il n'appartient pas de juger si on ne veut pas aller vers elle. Par les temps qui courent et la façon dont la plupart des gens écoutent de la musique, c'est sûr que cette musique peut donner l'impression qu'on se fout de celui qui écoute. Or elle ne s'adresse pas à ces gens. J'ai fait l'effort par le passé de plonger dans ce type de musique, parfois, on y entend une beauté inattendue (un peu la beauté violente et convulsive chère à Breton ou Artaud).
Malheureusement pour moi, je n'ai plus cette disposition d'écoute pour une tell musique. J'ai trop de truc à écouter qui s'offriront à moi avec moins d'écoute et que je sais que j'aurai dans la durée plus de facilité à réécouter.
Et j'ai également peur d'être déçue (même si la recommandation de Jimmy vaut de l'or pour moi). Mais il m'est arrivé de beaucoup investir sur certains disques et qu'au final, longtemps après, je n'éprouvais que de l'ennui à m'y replonger.
Pour les autres musiques, en trois écoutes, j'ai mes repères et sens le potentiel. Ici, je n'en suis pas capable. Et à dire vrai, si je dois passer autant de temps à m'immerger dans une musique difficile, je préfère la musique contemporaine ou le free jazz.
Mais il faut effectivement défendre comme le fait Jimmy une telle intégrité artistique. J'ai pas pris le temps de m'immerger, mais j'ai ressenti la haute exigence de ce groupe. Ce devrait être une attitude beaucoup plus rependu (sans forcer faire systématiquement aussi extrême).
Je me considère personnellement comme un punk et trouve légitime que chacun fasse comme il veut concernant la musique. En revanche, chère Audrey, je te contredirais sur deux points.
1) Merzbow n'est pas un groupe mais un musicien. Dire que tu préfères la musique contemporaine ou le free jazz c'est sous entendre un peu vite que la musique de Merzbow n'est ni de la musique contemporaine ni du free jazz. En tant que musicien il collabore aussi bien avec des musiciens qui appartiennent à la scène free jazz comme Mats Gustafsson qu'avec des ensembles de musique contemporaine comme Zeitkratzer ("Ensemble ovni, Zeitkratzer réunit onze personnes autour de Reinhold Friedl et brouille toute notion d’étiquette musicale. Zeitkratzer représente un modèle d’ensemble instrumental, ouvert à toutes les esthétiques des musiques de création. Issus des meilleurs orchestres et ensembles de musique contemporaine européens, notamment le Philharmonique de Berlin ou l’Ensemble Modern, passionnés de musique improvisée, de rock expérimental, de pop ou de noise, ces instrumentistes ont travaillé avec plus d’une centaine de musiciens et compositeurs, parmi lesquels Jim O’Rourke, Manuel Göttsching, Sonic Youth, Lou Reed, Keiji Haino, Alva Noto ou Merzbow... et interprété John Cage, Karlheinz Stockhau- sen, Iannis Xenakis ou James Tenney.")
2) Je ne pense tout simplement pas que ce disque soit violent ni même extrême. Tu peux ressentir le disque comme violent mais je pense que tu ne peux attribuer cette violence à l'intention de l'artiste. Je pense qu'il s'agit ici pour Merzbow de faire entendre le son à un niveau microcosmique. A propos de l'album de Merzbow intitulé Dharma je me plaisais à rappeler que La tradition rapporte que certains disciples seraient mort d’effroi à l'écoute de l'enseignement du Bouddha :le dharma. De là à dire que Bouddha serait violent, me semble être une erreur d'interprétation assez évidente. Ce qui n’empêche pas, par ailleurs, Merzbow de collaborer également avec des musiciens de la scène "death indus"
Tu as raison, ce disque n'est pas voilent. Et cependant, si, ce disque est violent. Non pas parce qu'il fait beaucoup de bruit. Mais parce qu'il nous arrache à la réalité, à notre quotidien. Et il l'est beaucoup plus que ces groupes indus, hardcore et autres, dont la violence peut s'émousser ou devient gratuite.
Tu as par contre raison sur la musique contemporaine. Ce disque en fait partie, on va dire que j'entendais "musique contemporaine" dans le sens classique de terme. ^-^ En fait, contemporaine d'il y 100 ou 30 ans pour moi, je n'ai pas la prétention d'être à la page... Et malgeureusement pour moi, je n'ai pas le temps d'écouter tout ce que j'aimerai parce que mon entourage n'y est pas trop sensible et que je ne dispose plus de dizaine d'heures pour ça.
Donc forcément, je dois me restreindre. Et je trouve que la place que tient la musqiue rock reste bien trop grande par rapport au musique traditionnelle ou moderne du monde entier, au jazz ou au classique contemporain ou pas... Et cette place, je sais que Merzbow ne l'aura guère même si j'y mettais de la bonne volonté. Je ferais cette expérience pendant une semaine ou deux puis il serait enterré. Et je le déterrais dans 10 ans si aucun disque plus récent n'aura pas pris sa place.
J'aime écouter de la musique. Mais j'aie aussi avoir du temps de réecouter. Et même ce temps-là, je ne l'ai plus assez... J'ai l'impression que des disques que j'adore pourtant parviennent même plus à mes oreilles une fois tous les deux ou 3 ans, voire moins...
Et je regrette vraiment que ces musqiues aussi exigeantes que Merzbrow (j'ai fait l'imposse puor Zorn également pour toutes ces raisons alors que c'est également un artiste a priori passionnant) n'aient plus leur place dans ce temps que je consacre à la musique.
Merci Sb et Audrey pour vos nouveaux commentaires.
C'est beau de lire ces échanges qui sentent la passion et ces gens qui courent après le temps pour nourrir ladite passion, alors que l'immense majorité s'en fout plus que totalement!
Sb, si tu veux poster quoique ce soit chez moi, tu sais que tu seras toujours le bienvenu.
Merci Jimmy, j'ai déjà la chance d'être dans ta blogroll. Je n'en demande pas plus.
@Audrey
Je comprends ce que tu écris mais j'aimerais attirer ton attention sur le fait que les disques sont des enregistrements et qu'au regard de l'histoire de la musique, un enregistrement de ce qui avant n'était que pur flux musical lors de concerts, de pratiques amateurs chez soi, et dans les lieux publics, les bars, les cinémas, un enregistrement donc, n'est pas forcément quelque chose qui va de soi (même quand on est né avec)
Avec le streaming (bandcamp, spotify) on revient à l'idée de flux. J'ai donc une vision très différente. N'écouter un disque qu'une seule fois ne me pose aucun problème. Ne plus jamais réécouter un disque que j'ai adoré non plus. Quand on va voir des concerts c'est éphémère. On peut voir plusieurs fois le même groupe jouer, ce n'est jamais le même concert. Un enregistrement n'est qu'un pis aller, je ne vois aucune raison de les chérir outre mesure.
Y'a rien de terrible à tous ces sons (bruit blanc z'et autres) générés par des machines, et le seul élément intéressant tant soit peu à mes yeux (pardon, mes oreilles) est l'usage de séquenceurs. Et le tout me fait penser n'est pas Richard Pinhas qui veut! Il y a une chose à ne pas perdre de vue, au milieu de tout ce verbiage sur la façon d'écouter la musique, c'est que l'auteur a théoriquement voulu illustrer "musicalement" des insectes! Mais il ne suffit pas de manipuler des potars en rythme ou pas pour faire passer ce message. Il est évident que cela demande de l'expérience, mais n'en fait pas pour autant un musicien. Toute cette catégorie de knob manipulator ne crée RIEN, c'est la machine qui le fait pour eux. Seul la programmation va requérir un certain sens du rythme, mais elle corrige automatiquement les défauts. Dans cet immense désert de sons, il n'y a plus de place pour le sentiment, celui exprimé par l'usage d'un instrument et de sa maîtrise. Ce qui implique des heures, des jours mois et années de pratique. Ici, un quart de tour du bouton change la fréquence, qui, somme toute, accolée à la suivante, va faire "vivre" un insecte. Il y aurait comme un parfum de tromperie, et je pense que toutes les élucubrations intellectuelles (du style: un enregistrement n'est qu'un pis-aller, alors qu'il peut être d'un sublime résultat) pour faire valoir ce genre de pratiques, ne me feront pas changer d'avis.
Mais ceci ne m'empêchera pas de l'écouter et de le re-écouter car je chercherai l'étincelle qui me dira que je n'ai pas perdu mon temps!
Looping
En tout cas, merci pour le poste. J'ai déniché le site de l'illustrateur, et les dessins sont superbes, un peu comme l'image que je me fais de la musique!
Pour le trouver, c'est simple, un p'tit coup de gogole et le tour est joué. Après, imprimécran fait le reste.
ps: ne raté pas Douganebuibui, un chef-d'oeuvre bruitiste!
Hello Looping,
Pour faire court, disons que Richard Pinhas ne doit pas être tout à fait de ton avis, puisqu'il tient Merzbow en haute estime et à même enregistré avec lui!
Au plaisir de te relire.
"Mais il ne suffit pas de manipuler des potars en rythme ou pas pour faire passer ce message. Il est évident que cela demande de l'expérience, mais n'en fait pas pour autant un musicien. "
Il faut aussi beaucoup d'expériences pour avoir une écoute libre de tout préjugé.
"il n'y a plus de place pour le sentiment, celui exprimé par l'usage d'un instrument et de sa maîtrise. Ce qui implique des heures, des jours mois et années de pratique."
Beaucoup de musiques parfaitement maitrisées ne font naitre chez moi aucun sentiment. Que dois-je en conclure? Que les autres qui en ont se font avoir?
Qui peut croire comprendre un poème de Rimbaud à la lecture d'un seul de ses poèmes? Ce qui permet de comprendre Merzbow c'est une écoute d'au moins 1/10éme de son oeuvre... soit au moins une dizaine de disques. Il sort une dizaine de disques par an depuis 1979.
Mon grand-père pensait sérieusement que Picasso ne savait pas dessiner. Mon grand père savait de quoi il parlait, il était peintre, lui.
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