94.
I
HAD TO MUCH TO DREAM LAST NIGHT [THE
ELECTRIC
PRUNES]
Olympia,
aussi
belle que toujours dans une robe violine à peine trop décolletée,
terminait son introduction sous
les hurlements hystériques
de son fan club,
pendant que nous patientions entassés sur les
marches menant à la sortie de secours. La
tension avait débordé son comble depuis lurette. On
respirait comme une douce odeur d'orgie ! Plus qu'une poignée de
secondes et un
lâché de poussière d'étoiles, et
nous allions pouvoir téter
le
sein de l'éternité ou un machin dans ce goût là (voire
peut-être mieux encore)
!
Au
moment où
mon
amoureuse allait
déposer le point final au bout de son discours et
que nous nous apprêtions à bondir enfin sur la scène,
d'extravagants coups de sifflet retentirent dans la salle. Il
résonnèrent aussi affreusement que le « non » d'une mariée le
matin de ses noces.
Le
toit du Gibus se serait ouvert et les nuages se seraient dissipés
pour que des hectolitres de fiente s'écroulent du ciel pour glisser
à nos pieds que ça n'aurait été plus
dramatique.
De nouveaux coups de sifflet, plus stridents encore, retentirent de
plus moche. La foule s'écarta alors pour laisser place aux
patibulaires
perturbateurs...
Et,
là, que vis-je que
mes yeux ne voulurent pas croire
? Les ectoplasmes de la Brigade de l'Ile Déserte, dans leur vilain
costard
trop étroit, venant me réclamer cette satané liste de disques ! Et
pourquoi pas la Mère Noël en portes jarretelles mauves, Lucky Luke
en amazone sur le dos de Rossinante ou
Anny Cordy à la cérémonie du Rock'n'roll of Fame
pendant qu'on y était ?! Ô
cauchemars maudits, quand ces
deux balourds me laisseraient-ils enfin rêver en paix ?
Pour
parer à toute éventualité,
je mis ma dernière liste à jour et la glissai dans la poche de ma
veste de
scène
; avec des lustucrus
de
cette espèce,
on était jamais trop prudent ! Je les imaginais bien capable
de déserter leur souterrain
pour
venir me rejouer leur petit numéro en vrai !